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MA FEMME

la cour n’était pas votre femme, c’était souvent celle d’un autre ; bien des raisons devaient l’engager à retarder l’heure de sa chute ; au bord de l’abîme, mille craintes, mille terreurs, des scrupules de tous genres, pouvaient la retenir ; si ses hésitations et ses résistances étaient pour vous un supplice, du moins vous les admettiez et vous étiez même disposé à les comprendre.

Mais dans le cas qui nous occupe, où voyez-vous, je vous prie, de bonnes raisons à faire valoir pour expliquer une si longue résistance ? Où sont les craintes, les terreurs, les scrupules ? Enfin, où se trouve l’abîme ?

Je ne sais pas pourquoi j’essaye de vous convaincre ; vous étiez rallié à ma cause, j’en suis persuadé, avant de m’entendre, et si je vous étonne, c’est par mon inaltérable patience, que vous appelez déjà peut-être de la faiblesse ou de la niaiserie.

Eh bien ! à partir de mon seizième jour de surnumérariat, je n’ai plus été patient, et du reste je ne pouvais plus l’être. Sous l’empire d’une irritation continuelle, mon caractère s’était aigri, et moi qui avais pu longtemps m’imaginer n’avoir pas de nerfs, j’étais maintenant en butte à une foule de souffrances nerveuses des plus vives.