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MA FEMME

qu’elle avait habitée avec une femme de ses amies, une Française, qui, après l’avoir attendue quelque temps, était repartie avec elle, le lendemain de mon passage à Nemours. Les deux voyageuses qu’accompagnait une femme de chambre, s’étaient, m’assurait-on, dirigées vers Oran, par la route de Tlemcen ; elles devaient être arrivées au moins depuis cinq jours.

Le croiriez-vous, mon cher ami, je ne me pressai pas de les rejoindre. Pendant la semaine qui venait de s’écouler, la colère, l’indignation, l’ardeur de la lutte m’avaient soutenu. Maintenant mes nerfs se détendaient, l’attendrissement succédait à la colère et je succombais sous une immense lassitude physique et morale. « À quoi bon me presser, me disais-je ; le hasard me conduit, la fatalité me poursuit ! »

J’abandonnais les rênes sur le cou de mon cheval et je le laissais marcher à sa guise. Doucement bercé sur ma selle, les yeux à moitié fermés, j’avais d’étranges hallucinations : j’entendais la voix de Mme de Blangy, elle faisait à Paule de vifs reproches de m’avoir suivi, d’être restée si longtemps à Oran, sans essayer de la rejoindre. Elle lui disait : « Tu le préfères à moi, maintenant ; son affection a remplacé la mienne. Mais je t’arracherai à