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MADEMOISELLE GIRAUD

sont ignorantes d’une foule de petits détails de la vie féminine en commun qu’il leur importerait de savoir.

Elle s’arrêta. Je lui dis :

— Alors vous n’admettez pas qu’une jeune fille élevée au couvent puisse faire une honnête femme ?

— Grand Dieu ! s’écria-t-elle. Je suis loin d’avoir une pareille idée. Les impressions éprouvées au couvent s’effacent certainement ; les plus impressionnables même peuvent devenir des femmes accomplies et d’excellentes mères de famille.

— Mais quelques-unes peuvent-elles échapper aux mauvaises impressions dont vous parlez et sortir du couvent aussi pures qu’elles y sont entrées ?

— Certainement, répondit-elle ; c’est une affaire de hasard : cela dépend de celles de leurs camarades qu’elles ont fréquentées.

La tournure que prenait notre conversation avait sans doute réveillé en elle de lointains souvenirs. Le coude sur la table, la tête dans la main, elle garda pendant un instant le silence. Tout à coup, sans changer d’attitude, les yeux baissés, elle dit d’une voix émue, comme si elle se parlait à elle-même :

— On a quatorze ans et l’esprit déjà éveillé (mais pour