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MADEMOISELLE GIRAUD

créatures plus ou moins divines, je les donne à tous les diables.

« Ah ! vous êtes trop difficile, me dit-on. Faites vos affaires vous-mêmes ; nous ne nous en mêlons plus. »

C’est ce que je demande ; enfin ! Maintenant, lorsque j’entrerai dans votre salon, madame, vous ne me direz plus : « Regardez donc là, à gauche, sur la troisième banquette, elle est jolie, n’est-ce pas ? cent cinquante mille francs et des espérances. Et là, près de la cheminée, cette blonde, de l’esprit comme un démon, et un père millionnaire. Et cette troisième, un ange, je l’ai vue naître, j’en répondrais comme de ma fille, et cette autre… » Mais non, mais non, vous me donnez des torticolis, madame ; ma tête n’est pas une girouette. Je suis redevenu un monsieur comme tout le monde, j’ai le droit de causer dans un coin avec un ami, sans que vos yeux aient l’air de me dire : « Vous perdez votre temps, jeune homme, vous n’êtes pas ici pour vous amuser ; il s’agit de votre avenir. » Je puis me livrer aux douceurs d’un écarté, je suis libre de savourer une glace sans que vous me preniez par la main, pour me présenter à toute une smala de filles maigres, qui viennent de déboucher dans les salons. Ah ! je respire, et s’il me reprend fantai-