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il fut admis parmi les dieux, les zémés, d’une religion beaucoup moins simple qu’il ne paraît l’avoir soupçonné au début.

Tout allait donc au mieux, suivant les désirs de Colomb, quand tout à coup il fit appareiller du port de la Conception, où il se trouvait depuis peu, et se dirigea, au nord, vers une terre supposée qui. au dire des Haïtiens, produisait de l’or en abondance. Les vents le poussèrent sur l’île de la Tortue, une île de peu d’importance comme étendue, mais dont les beautés naturelles le ravirent tellement, qu’il donna le nom de Paradis à une de ses vallées. Là, soit que l’admiration eût changé le cours de ses idées, soit qu’il commençât à se défier des rapports des naturels, il renonça à chercher l’or dans ce paradis dont tant de flibustiers devaient bientôt faire un enfer, et, longeant le canal qui sépare la Tortue de Saint-Domingue, il reprit son exploration des côtes de cette dernière île.

Il les trouva de plus en plus hospitalières, grâce au mot d’ordre et aux impressions semées par les rapides émissaires d’Anacoana,

À peine avait-il mouillé dans le port de la Paix, que plus de cinq cents Indiens, et parmi eux des femmes de la plus rare beauté, accoururent joyeusement à sa rencontre, amenant leur roi, et répondant, par cette marque de haute confiance, à un des plus vifs désirs de l’Amiral. Bien que ce roi, ou plutôt ce chef de district qu’ils appelaient un cacique, fût aussi peu vêtu que le moindre de ses sujets, la supériorité de son rang se laissait voir au premier abord, à ses manières plus libres et plus réservées à la fois. Colomb le reçut à bord avec les honneurs militaires, et obtint de lui quelques renseignements plus ou moins utiles, entre autres sur cette éternelle Babèque où Las Casas remarque qu’on n’arriva jamais.