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La Pinta était réparée, et l’escadre, pourvue abondamment de vivres frais, avait appareillé, malgré la faiblesse et l’incertitude du vent, lorsgue, à la hauteur de l’île de Fer, le commandant d’un vaisseau venant de cette île apprit à l’amiral de quels dangers il était menacé, dangers d’autant plus grands qu’un calme plat le retenait dans le voisinage de l’ennemi, Christophe Colomb, n’était pas homme à craindre une bataille, mais, comme tous les vrais grands hommes, il n’aimait pas le danger pour le danger même ; or, il se disait qu’en cette occurence la victoire, même la plus glorieuse, lui aurait causé des avaries de nature à ajourner indéfiniment la poursuite de son entreprise. Il fallait donc éviter un combat au prix duquel son propre équipage aurait peut-être acheté avec joie l’abandon d’une aventure à laquelle les éléments semblaient aussi opposés que les hommes.

À cette mer stagnante et comme déjà lasse de les porter, à ce vent qui refusait d’enfler leurs voiles s’ajoutait la menace ou tout au moins le présage peu favorable du pic de Ténériffe vomissant des gerbes de flamme et de noirs tourbillons de fumée.

Pour calmer la frayeur que causait un spectacle nouveau, Colomb citait l’Etna et le Vésuve, dont quelques-uns de ses hommes avaient pu voir d’inoffensives éruptions. Au calme qui semblait menacer de les livrer à l’ennemi, il répondait avec sa confiance ordinaire en Celui qui fait souffler le vent d’où il veut, et, en effet, de même qu’au départ de Palos, le vent s’éleva du nord-est avec l’aurore du second jour, et il eut bientôt emporté les trois caravelles hors des atteintes du volcan et de la vue des îles.

Quant aux pirates du roi de Portugal, Colomb savait par expé-