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Poèmes Tragiques. Il n’avait pas besoin de crier à la foule :


Je ne te vendrai pas mon ivresse ou mon mal ;
Je ne livrerai pas ma vie à tes huées,
Je ne danserai pas, sur ton tréteau banal
Avec tes histrions et tes prostituées !


Beaux vers ; mais la foule ne hue pas les poètes qui lui racontent leurs peines ; elle ne les confond pas avec les histrions ; et Leconte de Lisle lui a vendu, comme les autres, son ivresse et son mal ; il les lui a débités dans des scènes tragiques, dans des tableaux barbares, dans des récits qui l’eussent fait frémir si elle avait pu les entendre ; et, comme il a été malheureux, il nous a imposé la vision triste d’un monde où tout n’était qu’illusion, — sauf la majesté de ses vers.