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L'ANARCHIE

léanistes, les bonapartistes, les modérés, c’est contre le pouvoir des légitimistes.

Et réciproquement.

Tous ces partis que vous voyez se mouvoir à la surface du pays, comme flotte l’écume sur une matière en ébullition ne se sont pas déclaré la guerre à cause de leurs dissidences doctrinales ou de sentiment, mais bien à cause de leurs communes aspirations au pouvoir ; si chacun de ces partis pouvait se dire avec certitude que le pouvoir d’aucun de ses antagonistes ne pèserait plus sur lui l’antagonisme cesserait instantanément, comme il cessa, le 24 février 1848, à l’époque où le peuple ayant dévoré le pouvoir, s’était assimilé les partis.

Il est donc vrai qu’un parti quel qu’il soit, n’existe et n’est craint que parce qu’il aspire au pouvoir ; il est donc vrai que nul n’est dangereux qui n’a pas le pouvoir ; il est vrai, par conséquent, que quiconque a le pouvoir est tout aussitôt dangereux ; il est, par contre, surabondamment démontré qu'il ne peut exister d'autre ennemi public que le pouvoir.

Donc, socialement et politiquement parlant, le pouvoir, c’est l’ennemi.

Et comme j’ai prouvé plus haut qu’il n’y avait pas de parti qui n’aspirât au pouvoir, il s’en suit que tout parti est préméditement l’ennemi du peuple.

CHAPITRE VII.

QUE LE PEUPLE NE FAIT QUE PERDRE SON TEMPS ET PROLONGER SES SOUFFRANCES EN ÉPOUSANT LES QUERELLES DES GOUVERNEMENTS ET DES PARTIS.


C’est ainsi que s’explique l’absence de toutes les vertus populaires dans le sein des gouvernementset des partis c’est ainsi que, dans ces groupes nourris de petites haines, de misérables rancunes de mesquines ambitions, l’attaque est tombée dans la lâcheté et la défense dans l’abjection.

Il faut flétrir le vieux journalisme ; il faut destituer ces maîtres sans noblesse qui tremblent de devenir valets ; il faut renvoyer ces valets sans fierté qui guettent le moment de se faire les maîtres.

Pour comprendre combien il est urgent de tuer le vieux journalisme, il est nécessaire que le peuple voie clairement deux choses.

Premièrement, qu’il ne fait que négliger ses affaires et prolonger ses souffrances en épousant la querelle des gouvernements et des partis, en dirigeant son activité vers la politique au lieu de l’appliquer à ses intérêts matériels.

Secondement,qu’il n’a rien à attendre d’aucun gouvernement ni d’aucun parti.

Sauf à le démontrer ultérieurement d’une manière plus précise, je pose en fait qu’un parti, dépouillé de cet éclat et de ce prestige patriotiques dont il s’environne pour attraper les sots, n’est tout simplement qu’un assemblage d’ambitieux vulgaires, faisant la chasse aux emplois. Cela est si vrai que la République n’a paru supportable aux royalistes que du moment où les fonctions publiques ont été occupées par les royalistes qui, j’en fais le serment, ne demanderont jamais à rétablir la royauté si on les laisse occuper en paix tous les emplois de la République. Cela est si vrai que les républicains n’ont trouvé le royalisme supportable que dès l’instant où, sous le