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LA NVICT.
L’vn pour fe faire grand & redorer l’image
A fa trifte fortune, efpoind de cefte ardeur,
Soupire après vn vent qui le plonge en erreur,
Car le Delîr n’eft rien qu’vn périlleux orage.


L’autre efclaue d’Amour, defirant l’auantage
Qu’on efpere en tirer, n’embralTant que le vent,
Loyer de fes trauaux , efl payé bien souuent
D’vn refus, d’vn dédain & d’vn mauuais vifage.

 
L’vn plein d’ambition , defireux de pareftre
Fauorit de fon Roy, recherchant fon bon-heur,
Auançant fa fortune, auance fon malheur.
Pour auoir trop fondé le fecret de fon maiftre.


Defirer eft vn mal, qui vain nous enforcclle :
C’eft heur que de iouïr, & non pas d’efpôrer :
Embrailér l’incertain, & toufiours defirer
Efl vne paffion qui nous met en ceruelle.


Bref le Defir n’eft rien qu’ombre & que pur menfonge
Qui trauaille nos fens d’vn charme ambitieux,
Nous déguifant le faux pour le vray, qui nos yeux
Va trompant tout ainfi que l’image d’vn fonge.




LA NUICT.


O Douce Nuict, ô Nuict plus amoureuse.
Plus claire & belle, & à moy plus heureuse.
Que le beau iour, & plus chère cent fois.
D’autant que moins, ô Nuict, ie t’esperois.
Et vous, du ciel estoites bien apprises
A secourir les secrettes emprises