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sur des restes de gradins, quelques pots à fleurs garnis de baguettes, dont le feuillage desséché attestait qu’autrefois les bâtons avaient été des plantes.

Le chariot roula sur une allée de cailloutage entremêlé de mauvaises herbes, sous la noble avenue ombragée d’arbres de la Chine, dont les formes gracieuses et le feuillage toujours vert semblaient seuls prospérer au milieu de la décadence universelle ; comme la droiture, la bonté, enracinées dans de grandes et nobles âmes, fleurissent et s’affermissent au milieu des souffrances et des découragements.

La maison, qui avait été belle et spacieuse, était construite sur un plan assez ordinaire dans les États du Sud : une véranda, à deux étages (le premier, supporté par des piliers de briques), entourait l’édifice, et chaque pièce ouvrait sur ces larges galeries. Mais partout régnait le même aspect de délabrement et d’abandon. Quelques fenêtres étaient bouchées par des planches ; les vitres des autres étaient brisées ; les volets pendaient aux murailles, retenus par un seul gond. La négligence, la désolation frappaient de tous côtés les yeux.

Le terrain était jonché d’immondices de tous genres : bois, paille, tonnes défoncées, caisses en pièces. Trois ou quatre féroces boule-dogues, excités par le bruit des roues, accoururent gueules béantes, et les efforts d’un petit nombre d’esclaves en guenilles qui les suivaient, suffirent à peine pour les empêcher de se jeter sur la bande dont Tom faisait partie.

« Hein ! voyez-vous, mes drôles ! s’écria Legris, se retournant vers eux, tout en caressant ses chiens avec une hideuse satisfaction, vous voyez ce qui vous attend, s’il vous prenait fantaisie de gagner au large ! Ces bons gardiens-là, savez-vous ? sont dressés à chasser au nègre, et se régaleraient d’un de vous comme du meilleur souper. Ainsi, gare à votre peau !

« — Eh bien ! Sambo, dit-il à un noir couvert de haillons,