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Hè hi ! — hè hà ! — La lune
S’est fait voir sur la brume !
Ho ! — ho ! — aïe ! — hola là !
Oh yo ! — eh hi ! — oh — ha !

Le chanteur paraissait improviser à sa fantaisie, saisissant çà et là une rime au hasard, sans s’inquiéter autrement du sens et de la raison. Toute la bande reprenait en chœur par intervalle :

Ho ! — ho ! — aïe ! — hola là !
Oh yo ! — eh hi ! — oh ha !

C’était chanté impétueusement, avec de bruyants efforts pour se montrer gais ; mais jamais lamentables gémissements, jamais accents de douleur, jamais prières ferventes n’auraient pu atteindre à l’expression déchirante, désespérée, des notes sauvages de ce refrain. On eût dit que ces pauvres âmes muettes, menacées, — emprisonnées, — se réfugiant dans le sanctuaire de l’harmonie, avaient recours à des sons inarticulés, mélodieux langage, pour exhaler leurs prières à Dieu ! prières que Simon ne pouvait comprendre. Il entendait les éclats de la voix des esclaves ; il ne lui en fallait pas plus : « il les avait remontés ! »

« Eh bien, la petite mignarde, dit-il, se tournant vers Emmeline, et allongeant sa rude main sur l’épaule veloutée de la jeune fille : nous voilà quasiment rendus au gîte ! »

Les vociférations, les fureurs de Legris terrifiaient la pauvre Emmeline ; mais lorsqu’il posait la main sur elle, comme il venait de le faire, en prenant le ton cajoleur, elle eût préféré mille fois qu’il la frappât. L’expression de ses yeux la faisait défaillir, et elle se sentait frémir en sa chair. Involontairement elle se cramponna à la mulâtresse assise à ses côtés, comme si c’eût été sa mère.

« N’as-tu jamais porté de pendeloques, hein ? dit-il,