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chaque côté de l’arène circulaire s’élèvent de petites tribunes, à l’usage des commissaires-priseurs et des crieurs. Deux d’entre eux, gens instruits et de bonne mine, s’efforcent à l’envi, en un jargon moitié anglais, moitié français, de vanter la marchandise et de faire hausser les enchères. Une troisième tribune, encore vide, est entourée d’un groupe qui attend que la vente commence. Au premier rang figurent les domestiques de Saint-Clair : — Tom, Adolphe et leurs camarades ; là aussi Suzanne et Emmeline, inquiètes, abattues, se serrent l’une contre l’autre. Différents spectateurs, venus sans intention précise d’acheter, sont réunis autour des articles à vendre, les palpent, les inspectent, et discutent sur leur valeur et leurs dehors, avec la même liberté qu’en pourrait mettre une bande de jockeys à commenter les mérites d’un cheval.

« Holà, Alf ! qui vous amène ici ? dit un jeune beau, en frappant sur l’épaule d’un autre élégant, occupé à examiner Adolphe à travers son lorgnon.

— On m’a dit que les gens de Saint-Clair se vendaient aujourd’hui ; j’ai besoin d’un valet de chambre : j’ai voulu voir si le sien m’irait.

— Qu’on m’y prenne à acheter un seul des gens de Saint-Clair ! des nègres gâtés, du premier au dernier ! impudents comme le diable !

— Ne craignez rien, dit le beau ; une fois à moi, je les ferai bien changer de ton. Ils verront qu’ils ont affaire à un autre maître que monsieur Saint-Clair. — Sur ma parole, le drôle me revient ! je l’achèterai. J’aime sa tournure.

— Il absorbera tout votre avoir, rien que pour son entretien. Il est d’une dépense extravagante !

— Oui ; mais milord s’apercevra qu’on ne peut pas se permettre d’extravagances avec moi. Quelques visites à la Calabousse l’auront bien vite redressé ; c’est un moyen infaillible, je vous assure, de lui faire sentir l’inconvenance