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Tandis que cette conversation se passait au salon, une autre avait lieu dans la bibliothèque.

Tom, qui suivait partout son maître avec inquiétude, l’avait vu entrer, quelques heures auparavant, dans la « chambre aux livres » ; après l’avoir vainement attendu à la sortie, il se résolut à pénétrer dans la bibliothèque sous un prétexte quelconque, et ouvrit doucement la porte. Saint-Clair, étendu sur un lit de repos à l’autre bout de la pièce, était couché sur la figure ; à peu de distance devant lui, la Bible d’Éva était ouverte. Tom s’approcha, et se tint debout près du lit. Il hésitait, et, pendant son hésitation, Saint-Clair se souleva tout à coup. L’honnête visage, plein de tristesse, exprimait tant de suppliante affection, tant de sympathie, que le maître en fut frappé. Il posa sa main sur celle de Tom, et y appuya son front.

« Oh ! Tom, mon garçon, le monde entier est vide, aussi vide qu’une coquille d’œuf !

— Je le sais, maître, — je le sais. Mais si maître pouvait seulement regarder là-haut, — là-haut où est notre chère miss Éva, — là-haut où est le cher seigneur Jésus !

— Ah ! Tom, je regarde ; mais, hélas ! je ne vois rien. Plût au ciel que je visse quelque chose ! »

Tom soupira profondément.

« Il semble qu’il soit donné aux enfants et aux humbles, innocents comme toi, Tom, de voir ce que nous ne pouvons voir, dit Saint-Clair. D’où cela vient-il ?

— « Tu as caché ces choses aux sages et aux intelligents, et tu les as révélées aux petits enfants, murmura Tom ; il est ainsi, ô mon père ! parce que telle a été ta volonté[1]. »

— Tom, je ne crois pas — je ne peux pas croire ; j’ai pris l’habitude du doute, dit Saint-Clair. Je voudrais croire à la Bible, et je ne peux pas.

— Cher maître, priez le seigneur Jésus. — Dites : « Je

  1. Évangile de saint Mathieu, ch. 21, verset 25.