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« Qu’est-ce qui te rend si mauvaise, Topsy ? : Pourquoi ne veux-tu pas essayer d’être bonne ? Est-ce que tu n’aimes rien, Topsy ? disait Éva.

— Sais pas. — Moi, bien aimer le suc’ candi et les aut’ bonnes choses, c’est tout.

— Mais, tu aimes quelqu’un, ton papa, ta maman ?

— Moi avoir jamais eu ni maman, ni papa, vous savez. Moi vous l’avoir déjà dit, miss Éva.

— Ah ! je sais, dit tristement la petite fille ; mais n’as-tu ni frère, ni sœur, ni tante, ni…

— Oh ! jamais eu rien, jamais eu personne, personne du tout.

— Mais, Topsy, — il ne tiendrait qu’à toi d’être bonne.

— Je puis être qu’une nèg, — rien aut’, — bonne ou pas bonne, dit Topsy. Si je pouvais m’ôter ma peau noire et venir tout blanc, oh ! je dis pas !

— Mais les gens peuvent t’aimer, quoique noire, Topsy ; miss Ophélia t’aimerait, si tu étais bonne. »

Le rire court, brusque, saccadé, habituelle expression de l’incrédulité de Topsy, fut sa seule réponse.

« Tu ne le crois pas ?

— Non ; elle peut pas me souffrir parce que je suis une nèg’. — Elle, aimer mieux un crapaud que moi la toucher ! Personne aimer nèg’s, nèg’s pouvoir rien faire de bon ; — mais tant pis, — moi m’en moque ! Et Topsy se mit à siffler.

— Oh ! Topsy, ma pauvre enfant, moi je t’aime ! s’écria Éva avec un élan d’âme passionné ; et elle appuya avec tendresse sa main transparente sur l’épaule noire de Topsy ; — je t’aime parce que tu n’as ni père, ni mère, ni amis, parce que tu es une pauvre petite fille malheureuse et abandonnée ! je t’aime et je te voudrais bonne ! Vois-tu, Topsy, je suis bien malade, je ne vivrai pas longtemps, et j’ai tant de chagrin de te voir méchante ! Sois bonne pour l’amour de moi, j’ai si peu de temps à rester avec toi, Topsy ! »