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éternellement de cette denrée humaine ; ils surgiront un jour, et élèveront avec eux la race de leurs mères.

— Fatras, — sottises !

— Juste, le vieux dicton, poursuivit Augustin ; il en sera comme aux jours de Noé : — « Les hommes mangeaient et buvaient, se mariaient et donnaient en mariage ; ils plantaient et ils bâtissaient, et ils pensèrent au déluge que quand il survint et emporta tout. »

— Ma parole, Augustin, je te crois fait pour être prédicateur ambulant ! — et Alfred se mit à rire. — Rassure-toi, va, possession vaut titre. Nous tenons le pouvoir et nous le tenons bien. La race sujette, — il frappa du pied la terre, — restera sujette. Nous avons assez d’énergie pour ménager notre poudre.

— Des garçons élevés comme Henrique font de fameux gardiens pour vos poudrières, dit Augustin ; si froids, si maîtres d’eux ! Le proverbe le dit : Celui qui ne peut se gouverner lui-même ne peut gouverner autrui.

— Il y a là quelque chose qui cloche, c’est vrai, dit Alfred en réfléchissant. Je ne puis nier que les enfants ne soient difficiles à élever sous notre régime. Il lâche la bride aux passions, déjà trop exaltées par la chaleur du climat. Henrique me donne du souci : l’enfant est généreux, franc, le cœur chaud ; mais un vrai brûlot dès qu’on l’excite. Pour venir à bout de lui, il me faudra, je crois, l’envoyer dans le Nord, où l’obéissance est plus de mise, et où il vivra davantage avec ses égaux, moins avec ses subordonnés.

— S’il est vrai que l’éducation des enfants soit la grande affaire de la race humaine, reprit Augustin, c’est chose à noter qu’en cela notre régime fonctionne si mal.

— Mal en quelques points, bien sur d’autres. Il rend nos garçons fermes, courageux. Les vices mêmes d’une race abjecte tendent à fortifier en eux les vertus contraire. Henrique, je le parierais, apprécie d’autant mieux