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CHAPITRE XXIII.

L’herbe se flétrit, la fleur se fane.


Pour tous, la vie coule jour par jour ; elle fila ainsi pour Tom, et deux années se passèrent. Séparé de tout ce qu’il aimait, sa pensée le reportait par douloureux élans vers ceux qu’il avait laissés derrière lui, et cependant il ne se sentait pas tout à fait malheureux. L’harmonie de l’âme est si parfaite que le choc suprême, qui brise à la fois toutes les cordes, peut seul en détruire l’accord. Si nous repassons en notre mémoire de longues années d’épreuves et de souffrances, nous trouverons que chaque heure y versait sa part d’allégement, de distractions imprévues ; et que, sans pouvoir se dire heureux, encore n’était-on pas complètement misérable.

Dans le livre qui, à lui seul, faisait toute sa bibliothèque, Tom avait lu :

« Reçois volontiers tout ce qui t’arrivera, et supporte avec douceur les changements qui t’affligeront. »

Cette sage doctrine s’accordait au mieux avec les habitudes réfléchies, avec la douce sérénité qu’il avait puisées dans la lecture constante de ce même livre.

La réponse à sa lettre, reçue en son temps, était écrite, nous l’avons dit, par massa Georgie, d’une bonne main d’écolier, ronde et ferme. Selon les propres paroles de Tom, « cela pouvait quasi se lire d’un bout de la chambre à l’autre. » On y voyait comment tante Chloé, par son savoir en pâtisserie, gagnait de gros gages chez un confiseur de Louisville, argent qui s’amassait pour compléter la rançon de Tom ; comment prospéraient Moïse et Pierrot ; comment la petite mignonne trottinait, par toute la maison, sous la surveillance de la famille en général, et de Sally en particulier. La chère case, à la vérité, était fermée pour l’heure, mais Georgie ne tarissait