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sonne ne vous l’a dit ? — Qui était votre mère voyons ?

— Jamais eu de mère du tout, dit l’enfant, et elle répéta sa grimace.

— Vous n’avez point eu de mère ! Que voulez-vous dire ? Où êtes-vous née ?

— Jamais née, moi, » persista Topsy avec une autre contorsion diabolique. Pour peu que miss Ophélia eût été nerveuse, elle aurait pu se croire en possession de quelque noir gnome, sorti du pays des lutins. Mais Ophélia était positive, allait droit au but, et elle ajouta, avec quelque sévérité :

« Vous ne devez pas me répondre sur ce ton, enfant ; je ne plaisante pas avec vous. Dites-moi où vous êtes née, et qui étaient vos parents, père et mère ?

— Suis jamais été née, moi, répéta le petit être avec plus d’emphase, jamais eu ni père, ni mère, ni rien du tout. Un espéculateur m’a nourrie avec un tas d’autres, et vieille tante Soué prenait soin du tas. »

L’enfant était évidemment sincère.

« Seigneur, miss Phélie, dit Jane avec un ris moqueur, il y en a des masses de ceux-là ! les spéculateurs les achètent tout petits, à bon compte, et les élèvent pour le marché.

— Combien avez-vous passé de temps avec vos derniers maîtres ? reprit miss Ophélia.

— Sais pas, maîtresse.

— Est-ce un an ? plus ? moins ?

— Sais pas, maîtresse.

— Seigneur ! miss, ces engeances-là ne peuvent pas répondre ! ça ne connaît rien au monde, ni jour ni an, reprit Jane. Ils ne savent seulement pas leur âge, à eux-mêmes !

— N’avez-vous jamais entendu parler de Dieu, Topsy ? »

L’enfant prit l’air effaré, et répéta sa grimace usuelle.

« Savez-vous qui vous a faite ?