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reprit gravement le père. Le Seigneur ne nous accorde les biens terrestres qu’afin d’en user avec justice et charité. Si pour cela nos gouvernants exigent de nous la dîme, nous devons la leur payer.

— Je n’en hais pas moins ces vieux propriétaires d’esclaves ! dit le garçon, aussi anti-chrétien que peut l’être un réformateur moderne.

— Tu m’étonnes, mon fils ! ta mère ne t’a jamais enseigné des paroles de haine. Ce que j’ai fait pour l’esclave, je le ferais pour le maître, si le Seigneur l’envoyait à ma porte à son heure d’affliction. »

Siméon deux devint pourpre ; mais la mère sourit et se contenta de dire : « Siméon est mon bon fils ; il est jeune ; en grandissant, il pensera comme son père.

— J’espère, mon cher monsieur, qu’aucun danger ne vous menace à cause de nous, dit Georges avec anxiété.

— Ne crains rien, Georges. Pourquoi donc serions-nous ici-bas ? Si nous n’acceptions quelque ennui pour servir une bonne cause, nous ne serions pas dignes de porter le nom d’amis.

— Mais, pour moi !… je ne puis m’y résigner ! dit Georges.

— Ne te trouble pas, ami Georges. Ce n’est pas pour toi, mais pour Dieu et pour le prochain. Maintenant, il te faut dormir tranquille. Ce soir, à dix heures, Phinéas Fletcher te conduira en avant, jusqu’à la prochaine station, — toi et ceux qui t’accompagnent. Les traqueurs te suivent de près : il ne faut pas nous attarder.

— Alors, pourquoi attendre à ce soir ? demanda Georges.

— Parce que de jour tu es en sûreté ici ; il n’y a personne dans la colonie qui ne soit un Ami, et tous veillent. D’ailleurs, il est plus sûr de voyager la nuit. »