Page:Beecher Stowe - La Case de l’oncle Tom, Sw Belloc, 1878.djvu/207

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Enfin on se mit à déjeuner, tandis que Marie, debout près du fourneau, surveillait la cuisson des galettes, qui, dès qu’elles atteignaient à la perfection du beau brun doré, passaient du gril sur les assiettes.

Rachel n’était jamais plus bénignement belle, plus véritablement heureuse, que lorsqu’elle présidait au repas de famille : elle mettait une tendresse maternelle à faire circuler les gâteaux, une plénitude de cœur à verser une tasse de café, qui semblaient infuser un esprit d’union et de charité dans la nourriture et le breuvage.

Pour la première fois Georges s’asseyait, sur un pied d’égalité, à la table d’un blanc. Il éprouva d’abord de la gêne, et quelque contrainte ; mais cette sensation se dissipa, comme un brouillard, sous l’influence de cette simple et cordiale hospitalité. C’était bien la maison, — l’intérieur de famille, — le home, — mot dont Georges n’avait encore jamais compris le sens. La croyance en Dieu, la foi en sa providence, commencèrent à entourer son cœur d’une auréole de paix et de sécurité. Les sombres doutes de l’athéisme, la misanthropie du désespoir, se fondirent devant la lumière d’un évangile vivant, animé du souffle des vivants, prêché par une foule d’actes d’amour et de bon vouloir ; actes qui, comme le verre d’eau froide donné au nom du Seigneur Jésus, ne resteront pas sans récompense.

« Père, qu’arrivera-t-il si l’on t’y prend encore cette fois ? dit Siméon deux, en beurrant sa galette.

— Je payerai l’amende, répliqua Siméon premier, tranquillement.

— Mais s’ils te mettent en prison ?

— N’êtes-vous pas en état, ta mère et toi, de mener la ferme ? dit Siméon en souriant.

— Oh ! mère est en état de tout conduire, dit le jeune garçon ; mais n’est-ce pas une honte de faire de pareilles lois ?

— Ne parle pas mal de ceux qui te gouvernent, Siméon,