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serrés sur sa large poitrine, tandis qu’un amer sourire crispait ses lèvres.

« Monsieur Wilson, dit-il, si les Indiens venaient vous faire prisonnier, vous, votre femme et vos enfants, et prétendaient vous tenir toute la vie à labourer et à faire venir le maïs pour eux, croiriez-vous de votre devoir de rester dans la condition à laquelle vous seriez appelé ? J’imagine plutôt que le premier cheval errant qui vous tomberait sous la main, vous semblerait une suggestion de la Providence ; — qu’en dites-vous ? »

Le petit vieillard ouvrit de grands yeux à cette espèce d’apologue ; il n’était pas grand raisonneur, mais il avait du moins ce qui manque à tant de logiciens sur ce sujet spécial, — le bon sens de savoir se taire, quand on n’a rien de bon à dire. Il se mit à caresser son parapluie, et à en aplatir soigneusement toutes les rides, émettant de temps à autre quelques observations générales.

« Vous savez bien, Georges, que j’ai toujours été de vos amis ; ce que j’en dis est pour votre bien. Il me semble vraiment que vous courez de terribles risques ! Vous ne pouvez espérer réussir. Si vous êtes pris, ce sera cent fois pis qu’avant : on vous maltraitera, et, après vous avoir tué à moitié, ou vous vendra au Sud, en bas de la rivière.

— Je sais tout cela, monsieur Wilson. Je cours des risques ; mais je me tiens prêt. Il ouvrit son surtout, et montra deux pistolets et un couteau-poignard. Jamais je n’irai dans le Sud. Non ! si les choses en viennent là, j’aurai toujours le moyen de conquérir six pieds de terre libre, — première et dernière possession que je réclamerai jamais du Kentucky.

— Vraiment, Georges, vous êtes dans une disposition d’esprit alarmante ! Vous parlez en désespéré. J’en suis chagrin ! Songez que vous allez violer les lois de votre pays.

— Encore mon pays ! — monsieur Wilson, vous avez un