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dépasse les autres. Par instants il s’écrie : « Venez, païens, car déjà ils pressent leur fuite ! »

CCIII

Au matin, à la première pointe de l’aube, s’est réveillé l’empereur Charles. Saint Gabriel, qui de par Dieu le garde, lève la main, sur lui fait son signe. Le roi ?… déceint ses armes et les dépose, et, comme lui, par toute l’armée, les autres se désarment. Puis ils se mettent en selle et par les longues voies et par les chemins larges chevauchent à grande allure. Ils s’en vont voir le prodigieux dommage, à Roncevaux, là où fut la bataille.

CCIV

À Roncevaux Charlemagne est parvenu. Pour les morts qu’il trouve, il se met à pleurer. Il dit aux Français : « Seigneurs, allez au pas, car il faut que j’aille moi-même en avant de vous, pour mon neveu, que je voudrais retrouver. J’étais à Aix, au jour d’une fête solennelle, quand mes vaillants chevaliers se vantèrent de grandes batailles, de forts assauts qu’ils livreraient. J’entendis Roland dire une chose : que, s’il devait mourir en royaume étranger, il y aurait poussé plus avant que ses hommes et ses pairs, qu’on le trouverait la tête tournée vers le pays ennemi, et qu’ainsi, le vaillant, il finirait en vainqueur. » Un peu plus loin qu’on peut lancer un bâton, au delà des autres, l’empereur est monté sur un tertre.