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sera plus par mon conseil. Sonner votre cor, ce ne serait pas d’un vaillant ! Mais comme vos deux bras sont sanglants ! » Le comte répond : « J’ai frappé de beaux coups. »

CXXX

Roland dit : « Notre bataille est dure. Je sonnerai mon cor, le roi Charles l’entendra. » Olivier dit : « Ce ne serait pas d’un preux ! Quand je vous disais de le faire, compagnon, vous n’avez pas daigné. Si le roi avait été avec nous, nous n’eussions rien souffert. Ceux qui gisent là ne méritent aucun blâme. Par cette mienne barbe, si je puis revoir ma gente sœur Aude, vous ne coucherez jamais entre ses bras ! »

CXXXI

Roland dit : « Pourquoi, contre moi, de la colère ? » Et Olivier répond : « Compagnon, c’est votre faute, car vaillance sensée et folie sont deux choses, et mesure vaut mieux qu’outrecuidance. Si nos Français sont morts, c’est par votre légèreté. Jamais plus nous ne ferons le service de Charles. Si vous m’aviez cru, mon seigneur serait revenu ; cette bataille, nous l’aurions gagnée ; le roi Marsile eût été tué ou pris. Votre prouesse, Roland, c’est à la malheure que nous l’avons vue. Charles le Grand — jamais il n’y aura un tel homme jusqu’au dernier jugement ! — ne recevra plus notre aide. Vous allez mourir et France en