Page:Becque - Théâtre complet, 1890, tome 2.djvu/73

Cette page n’a pas encore été corrigée

des honnêtes gens. Plus tard, M. Teissier, dans le mic-mac de ses affaires, se trouva une fabrique sur les bras. Il se souvint de votre père et lui offrit de la conduire à sa place, mais en prenant Vigneron aux appointements. À cette époque, notre ménage était hors de gêne ; votre père avait une bonne place dans une bonne maison, le plus sage était de la garder. Quinze mois se passèrent ; nous ne pensions plus à rien depuis longtemps ; un soir, à neuf heures et demie précises, j’ai retenu l’heure, la porte de vos chambres était ouverte, Vigneron et moi nous nous regardions en vous écoutant dormir, on sonne. C’était M. Teissier qui montait nos cinq étages pour la première fois. Il avait pris un grand parti, sa fabrique, pour dire le mot, ne fabriquait plus du tout ; il venait supplier votre père de la sauver en s’associant avec lui. Vigneron le remercia bien poliment et le remit au lendemain. Dès que M. Teissier fut parti, votre père me dit, écoutez bien ce que me dit votre père : Voilà une chance qui se présente, ma bonne ; elle vient bien tard, quand nous commencions à être tranquilles ; je vais me donner beaucoup de mal, tu seras toujours dans les transes jusqu’à ce que je réussisse, si je réussis ; mais nous avons quatre enfants et leur sort est peut-être là. Elle essuie une larme et serre la main de son mari ; les enfants se sont rapprochés ; émotion générale. Pour en revenir à ce que tu demandais, la chose me paraît bien simple. Teissier et M. Vigneron ont fait une affaire ensemble ; elle a été bonne pour tous les deux, partant quittes.