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pareil état. J’ai raison cependant, tout à fait raison contre vous. Une femme de mon âge et de mon expérience, qui a vu tout ce qu’on peut voir en ce monde, sait la valeur des choses et n’exagère pas les unes aux dépens des autres. BLANCHE, se jetant à ses genoux. Ecoutez-moi, madame. Que vais-je devenir, si votre fils ne m’épouse pas ? C’est son devoir. Je n’en connais pas de plus noble et de plus doux à remplir envers une femme dont on est aimé. Croyezvous que s’il s’agissait d’un engagement ordinaire, je m’humilierais au point de le rappeler. Mon cœur même, oui, je briserais mon cœur, plutôt que de l’offrir à qui le dédaignerait et n’en serait plus digne. Mais il faut que votre fils m’épouse ; c’est son devoir, je le répéterai toujours. Toutes les considérations s’effacent devant celle-là. Vous me parlez de l’avenir, il sera ce qu’il voudra, l’avenir, je ne pense qu’au passé, moi, qui me fera mourir de honte et de chagrin. MADAME DE SAINT-GENIS Enfant que vous êtes, est-ce qu’on parle de mourir à votre âge ! Allons, relevez-vous et écoutezmoi à votre tour. Je vois bien que vous aimez mon fils plus que je ne le pensais pour tenir autant à un pauvre garçon dont la position est presque misérable. Mais, si je consentais à vous marier avec lui, dans un an, dans six mois peut-être, vous me reprocheriez bien amèrement la faiblesse que