Page:Becq de Fouquières - L’Art de la mise en scène, 1884.djvu/281

Cette page n’a pas encore été corrigée

venez là, où il fait sombre; là, sous l'ombre de ces bouleaux... Y a-t-il longtemps que vous m'attendez?— Depuis que la lune est dans le ciel... Viens sur mon cœur; que le tien le sente battre, et que ce beau ciel les emporte à Dieu... Voyons, savez-vous ce que c'est que cela?— Quoi? cette étoile à droite de cet arbre?— Non, celle-là qui se montre à peine et qui brille comme une larme...» Toute cette scène, comme on le voit, est fortement empreinte d'un naturalisme plein de mélancolie.

Aujourd'hui, au théâtre, avec l'aide de la lumière électrique, la mise en scène pourrait réaliser le paysage nocturne décrit par le poète. Au commencement de l'acte, de lourds nuages sombres passeraient sur le ciel étoilé et sur la lune qu'ils obscurciraient. Enfin les nuages, en fuyant, laisseraient voir dans toute sa pureté un ciel profond et étoilé, au milieu duquel brillerait le disque lunaire. Les arbres, des bouleaux au feuillage léger, aux troncs clairs, disposés par bouquets, laisseraient le regard du spectateur se perdre dans «l'océan des nuits.» Le public participerait ainsi, comme les personnages du drame, à la vue de ces beaux effets de la nature, qui sont, en plus d'un endroit, pour Valentin et Cécile, les causes formelles de leurs pensées. Cependant, c'est par un motif de premier ordre que la Comédie-Française n'a pas dû chercher à réaliser cette poétique mise en scène, en admettant, pour un moment, qu'elle eût pu avoir la pensée de le faire. C'est qu'en effet, ce dont on peut juger par certains détails du dialogue (je t'aime! voilà