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moins général et moins élevé, et que son infériorité seule rapproche des données de la réalité courante et journalière. Ce but, quoique plus humble, est cependant celui qui seul justifie les prétentions de l'école réaliste. Étant données des passions humaines, qui sont de tous les temps, il s'agit de leur chercher des motifs dans notre monde actuel et de les développer selon des raisons déduites des lois complexes des sociétés modernes. Ramenée ainsi dans ces limites plus étroites, l'école réaliste peut se défendre et se justifier.

Dans ses fouilles au fond de l'homme moderne, et dans son étude directe de toutes les choses de la nature, le réalisme trouvera la vie, une vie intense mêlée à un mouvement vertigineux. Les limites superficielles de l'art se trouveront ainsi reculées; et l'exploration mettra le pied sur quelques-unes des terres encore peu foulées de l'humanité et de la vie. Le nombre des personnages de théâtre s'accroîtra considérablement, et chacun d'eux ne nous apparaîtra plus qu'avec son idéal particulier, c'est-à-dire un idéal ramené à la mesure de son intelligence, de son développement moral et de sa fonction sociale. D'où la diversité extraordinaire du spectacle, ce qui est une séduction pour l'esprit moins généralisateur du public actuel. Aussi l'avenir immédiat semble appartenir à l'art nouveau. Il était d'ailleurs fatal que l'apparition de l'école réaliste ou naturaliste fût synchronique à l'épanouissement de l'esprit démocratique dans les sociétés modernes.