Page:Becq de Fouquières - L’Art de la mise en scène, 1884.djvu/198

Cette page n’a pas encore été corrigée

action qui semblait trop lente ou stagnante, avait pour véritable cause les procédés de notre mise en scène appliqués aux drames de Shakspeare. Le rythme et la mesure de l'œuvre se trouvaient altérés, absolument comme si dans une phrase musicale on eût intercalé mal à propos un temps de silence. Je n'ignore pas que la division en actes des drames de Shakspeare est postérieure au poète. A cela on peut toutefois répondre que la représentation devait forcément opérer la division des tableaux, dont la répartition en cinq actes a été le résultat d'un travail critique réfléchi, peu de temps après la mort de Shakspeare, et à laquelle il est assez raisonnable de nous tenir. En tout cas, il ne peut y avoir plusieurs manières également bonnes d'opérer cette division. Au surplus, à défaut de l'exemple de Shakspeare, il resterait celui de Gœthe et de Schiller, et celui de Sheridan dans le théâtre anglais.

Pour conclure, je crois que l'on pourrait procurer un plaisir dramatique très vif aux spectateurs français, en montant sur nos scènes les plus belles œuvres des théâtres étrangers, espagnols, anglais et allemands, à la condition qu'on respectât la division générale et qu'on n'altérât pas l'intégrité de chaque acte par l'introduction d'entr'actes entre les divers tableaux qui le composent. Il faudrait dans ce but prendre le parti d'une mise en scène spéciale et sommaire qui permît de faire à vue, entre les tableaux d'un même acte, tous les changements de décorations nécessités par les changements de lieux. Grâce à la continuité du spectacle, ces drames conserveraient leur physionomie