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Un acte est une division dramatique qui doit avoir un commencement et une fin, dont toutes les parties sont indissolubles, et dont par conséquent la représentation ne doit pas offrir de solution de continuité pour les yeux, puisqu'elle n'en offre pas pour l'esprit. Dans un entr'acte, si court qu'il soit, un poète peut faire tenir un temps quelconque si grand qu'il soit. En généralisant le phénomène, on peut dire que dans un temps réel infiniment petit nous pouvons faire tenir un temps imaginaire infiniment grand. On en a une preuve dans ce fait que dans une seconde de sommeil le rêve fait entrer une suite considérable d'événements. La durée des entr'actes est donc sans rapports avec le temps supposé écoulé par le poète et avec le nombre d'événements qu'il imagine s'être passés entre deux actes. Donc, en allongeant un entr'acte, nous ne rendons nullement plus plausible l'intervalle plus ou moins grand de temps, supposé écoulé entre les deux moments de l'action au milieu desquels il s'intercale. La durée d'un entr'acte n'est pas proportionnelle à l'accroissement du temps. Voilà une des faces du phénomène; examinons l'autre.

Quand le rideau tombe, l'esprit du spectateur, dégagé de l'étreinte du poète, redevient immédiatement libre. Il y a dans cette chute du rideau, dans cette disparition absolue du spectacle, un signe manifeste de l'interruption de l'action dramatique. Une partie de cette action est dès lors accomplie, et l'esprit du spectateur est prêt à franchir l'espace de temps que voudra le poète, mais non à accepter, quand le rideau