Page:Becq de Fouquières - L’Art de la mise en scène, 1884.djvu/182

Cette page n’a pas encore été corrigée

précisément le centre, optique, qui est la place psychologique de Phèdre, et celle qui s'offre à elle le plus naturellement. En effet, Phèdre sort de ses appartements et veut revoir la lumière du jour; mais à peine a-t-elle fait quelques pas, soutenue par ses femmes, que ses forces l'abandonnent. C'est sur la ligne optique, qu'épuisée et ne se soutenant plus, elle s'arrête soudain et refuse d'aller plus loin. Dès lors, il est inadmissible que ses femmes la traînent jusqu'à ce siège qui est à gauche, lorsqu'il leur est si facile et si naturel de l'approcher. Alors Phèdre se laisse aller sur ce siège vers lequel elle n'aurait pas eu la force de marcher; et c'est ainsi, par le jeu de scène le plus simple, que Phèdre se trouve assise au centre optique, concentrant sur elle tous les regards des spectateurs de même qu'elle concentre sur elle tout l'intérêt du drame.

Comme on a pu s'en rendre compte, une grande partie de la science de la mise en scène consiste dans l'oscillation des jeux de scène autour du centre optique ou à droite et à gauche de la ligne optique. C'est une science comparable à celle qui préside à la composition et à la disposition d'un tableau. Quand il s'agit d'une scène complexe à plusieurs personnages, auxquels s'ajoute une figuration nombreuse, il faut déterminer le centre de gravité de la scène, si je puis me servir de cette expression, de façon qu'il se trouve le plus rapproché possible du centre optique. On sent bien d'ailleurs qu'il ne s'agit point ici d'équilibre entre des nombres, non plus que d'une sorte d'équilibre