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notre propre imagination. Cela n'empêche pas d'ailleurs que la tragédie grecque et la tragédie française n'obéissent au même principe essentiel, qui est la caractéristique du théâtre grec et du théâtre français, à savoir la prédominance constante de l'idée sur le fait et du développement moral sur l'acte matériel.

Dans la mise en scène d'une œuvre tragique, il est donc sage d'abandonner toute prétention à une restauration antique, inutile et impossible. On se perdrait immanquablement dans des essais aussi vains que puérils. Ce que l'on prend d'ailleurs souvent pour des restaurations ne sont que des caricatures décoratives: c'est ainsi qu'il y a quelques années on avait une tendance générale à jouer dans des décors de style pompéien les tragédies dont l'action nous reporte au delà des temps historiques de la Grèce. Il faut donc s'efforcer d'effacer les traits particuliers et s'en tenir aux grandes lignes générales, se contenter d'une architecture simple et grande tout à la fois, de hauts et sévères portiques, peu surchargés d'ornements. Le vaste espace est de tous les milieux celui qui convient le mieux à la grandeur tragique. Quant aux costumes, il faut non sans doute s'en tenir à ceux dont se contente la statuaire, qui est l'art du nu par excellence, mais ne pas s'en écarter de parti pris, et s'en inspirer, dans le choix des tissus, auxquels on doit demander de beaux plis sculpturals. Tout en évitant la monotonie dans les couleurs et la constante uniformité des vêtements blancs, on ne