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l’étourdir. Enfin, étouffée par la mauvaise odeur, Carathis fut forcée de quitter la galerie, après l’avoir dépouillée d’une partie de ses monstrueux trésors.

Cependant, le Calife n’avoit pas eu les visions qu’il attendoit ; mais il avoit gagné dans ces régions exhaussées un appétit dévorant. Il avoit demandé à manger aux muets, & ayant totalement oublié qu’ils étoient sourds, il les battoit, les mordoit & les pinçoit de ce qu’ils ne bougeoient pas. Heureusement pour ces misérables créatures, Carathis vint mettre le holà à une scène si indécente. Qu’est-ce donc, mon fils ? dit-elle, toute essoufflée ; j’ai cru entendre les cris de mille chauve-souris qu’on déniche d’un antre, & ce ne sont que ceux de ces pauvres muets que vous maltraitez : en vérité, vous ne méritez pas l’excellente provision que je vous apporte. Donnez, donnez ! s’écria le Calife ; je meurs de faim. Ma foi, vous auriez un bon estomac, dit-elle, si vous pouviez digérer tout ce que j’ai ici. Dépêchez-vous, repartit le Calife. Mais, ô ciel ! quelles horreurs ! que voulez-vous faire ? je suis prêt à vomir. Allons, allons, répliqua Carathis, ne soyez pas si délicat, aidez-moi à mettre tout ceci en ordre ; vous verrez que les mêmes objets que vous re-