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tinua sa course. Alors ils ordonnèrent aux Muézins d’appeler le peuple à la prière, tant pour l’ôter du chemin que pour l’engager à détourner par ses vœux une telle calamité ; tout fut inutile. Il suffisait de voir cette infernale boule pour être attiré après elle. Les Muézins eux-mêmes, quoiqu’ils ne la vissent que de loin, descendirent de leurs minarets, et se joignirent à la foule. Elle augmenta au point que, bientôt, il ne resta dans les maisons de Samarah que des paralytiques, des culs-de-jattes, des mourants, et des enfants à la mamelle dont les nourrices s’étaient débarrassées pour courir plus vite : même Carathis, Morakanabad et les autres s’étaient enfin mis de la partie. Les cris des femmes échappées de leurs sérails ; ceux des eunuques s’efforçant de ne pas les perdre de vue ; les jurements des maris, qui, tout en courant, se menaçaient les uns les autres : les coups de pieds donnés et rendus : les culbutes à chaque pas, tout, enfin, rendait Samarah semblable à une ville prise d’assaut et