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des milliers d’abeilles, et presque autant de santons, y faisaient leur demeure. On voyait alternativement rangés sur les bords du ruisseau des ruches et des oratoires, dont la propreté et la blancheur étaient relevées par le vert brun des hauts cyprès. Les pieux solitaires s’amusaient à cultiver de petits jardins, remplis de fruits, et surtout de melons musqués, les meilleurs de la Perse. Quelquefois on les voyait épars dans la prairie, s’amusant à nourrir des paons plus blancs que la neige, et des tourterelles azurées. Ils étaient ainsi occupés, quand les avant-coureurs du cortège impérial crièrent à haute voix : Habitants de Rocnabad, prosternez-vous sur les bords de vos sources limpides, et rendez grâce au Ciel qui vous montre un rayon de sa gloire ; car voici le Commandeur des Croyants qui approche.

Les pauvres santons, remplis d’un saint empressement, se hâtèrent d’allumer des cierges dans tous les oratoires, déployèrent leurs alcorans sur des lutrins d’ébène, et