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allumaient le bois magique, l’huile empoisonnée jetait mille feux bleuâtres, les momies se consumaient et lançaient des tourbillons d’une fumée noire et opaque : enfin, les flammes gagnant les cornes de rhinocéros, il se répandit une odeur si infecte que le Calife revint à lui en sursaut, et parcourut d’un œil égaré la scène flamboyante. L’huile enflammée découlait à grands flots, et les négresses, qui ne cessaient d’en apporter, joignaient leurs hurlements aux cris de Carathis. Les flammes devinrent si violentes, et le poli de l’acier les réfléchissait avec tant de vivacité, que le Calife, ne pouvant plus en supporter l’ardeur ni l’éclat, se réfugia sous l’étendard impérial.

Frappés de la lumière qui éclairait toute la ville, les habitants de Samarah se levèrent à la hâte, montèrent sur leurs toits, virent la tour en feu, et descendirent à moitié nus sur la place. Leur amour pour leur souverain se réveilla encore dans ce moment, et, croyant qu’il allait être brûlé