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CHAPITRE X.

SUPPLÉMENT AU CHAPITRE X.

L’ACCUSÉ DEVANT SES JUGES.


« Le moment critique est arrivé, où l’accusé va paraître aux yeux de ses juges. Je me hâte de le demander : Quel est l’accueil que vous lui destinez ? Le recevrez-vous en magistrat ou bien en ennemi ? Prétendez-vous l’épouvanter, ou vous instruire ? Que deviendra cet homme, enlevé subitement à son cachot, ébloui du jour qu’il revoit, et transporté tout à coup au milieu des hommes qui vont traiter de sa mort ? Déjà tremblant, il lève à peine un œil incertain sur les arbitres de son sort, et leurs sombres regards épouvantent et repoussent les siens. Il croit lire d’avance son arrêt sur les replis sinistres de leurs fronts ; ses sens déjà troublés sont frappés par des voix rudes et menaçantes ; le peu de raison qui lui reste achève de le confondre, ses idées s’effacent, sa faible voix pousse a peine une parole hésitante ; et, pour comble de maux, ses juges imputent peut-être au trouble du crime un désordre que produit la terreur seule de leur aspect. Quoi ! vous vous méprenez sur la consternation de cet accusé, vous qui n’oseriez peut-être parler avec assurance devant quel-