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DES DÉLITS ET DES PEINES.

CHAPITRE X.

DES INTERROGATIONS SUGGESTIVES.


Nos lois interdisent les interrogations suggestives, c’est-à-dire celles qui portent sur le fait même du délit ; parce que, selon nos jurisconsultes, on ne doit interroger que sur la manière dont le crime a été commis, et sur les circonstances qui l’ont accompagné.

Mais un juge ne peut se permettre les questions directes, qui suggéreraient à l’accusé une réponse immédiate. Le juge qui interroge, disent les criminalistes, ne doit aller au fait qu’indirectement, et jamais en droite ligne.

Si l’on a établi cette méthode pour éviter de suggérer au coupable une réponse qui le sauve, ou parce qu’on a regardé comme une chose monstrueuse, et contre la nature, qu’un homme s’accuse lui-même, quel que soit le but que l’on s’est proposé en interdisant les interrogations suggestives, on a fait tomber les lois dans une contradiction bien remarquable, puisqu’en même temps on a autorisé la torture.