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qu’il voulait joindre encore un petit mot à ma lettre. Vous devez connaître ses sentimens sur votre ouvrage : C’est à lui à vous dire s’il est content de la traduction…

Je ne vous cacherai pas la plus forte raison qui n’ait déterminé à tâcher de vous donner quelque bonne opinion de moi, c’est l’espérance que vous me pardonnerez plus facilement la liberté que j’ai prise d’apporter quelques changemens dans la disposition de quelques parties de votre ouvrage. J’ai donné dans ma préface les raisons générales qui me justifient ; mais je dois m’arrêter davantage avec vous sur ce sujet. Pour l’esprit philosophique qui se rend maître de la matière, rien n’est plus aisé que de saisir l’ensemble de votre traité, dont les parties se tiennent très-étroitement, et dépendent toutes du même principe. Mais pour les lecteurs ordinaires moins instruits, et sur-tout pour des lecteurs français, je crois avoir suivi une marche plus régulière, et qui en tout est plus conforme au moins au génie de ma nation, et à la tournure de nos livres.

La seule objection que je puisse craindre, est le reproche d’avoir affaibli la force et diminué la chaleur de l’original, par le rétablissement même de cet ordre. À cela voici mes réponses : Je sais que la vérité a le plus grand besoin de l’éloquence et du sentiment. Il serait absurde de penser le contraire, et ce ne serait pas avec vous sur-tout qu’il faudrait avancer un si étrange paradoxe. Mais s’il ne faut pas sacrifier la chaleur à l’ordre, je crois qu’il ne faut pas non plus sacrifier l’ordre à la chaleur ; et tout en ira mieux si