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posant des Farinacius, des Clarus, et de la foule des ordonnances qu’on ne lit plus, qu’on ne suit plus. Son adversaire, mettant de côté les citations, n’avait pour lui que la raison et l’humanité ; mais c’étaient deux voix bien puissantes dans un siècle philosophique. Le public, depuis quelque temps, commençait à les écouter, et à n’écouter qu’elles. Beccaria leur laissa le soin de sa vengeance : il vit paraître et s’éteindre, sans beaucoup de bruit, la critique du jurisconsulte français. J’ai eu le courage de la relire, l’auteur ayant eu le courage de la réimprimer. J’y ai vu Beccaria traité d’illuminé, d’écrivain dangereux, sans principes ; j’y ai vu nos lois pénales traitées de chefs-d’œuvre en législation. Le bon criminaliste français, dans son enthousiasme pour son idole, fait l’apologie de la torture, des indices, de nos affreux supplices ; il se plaindrait presque que la justice n’est pas encore assez cruelle ; il fait des vœux sincères pour qu’on écrase la philosophie, pour qu’on éteigne le flambeau de l’humanité, et annonce à tout l’univers qu’il sera corrompu, malheureux, tant qu’il écoutera leurs voix séduisantes ; que la législation ne peut se perfectionner, se simplifier, qu’en ramassant, lisant et méditant les milliers de volumes publiés par les Romains, les Grecs, et sur-tout par les jurisconsultes français, du nombre desquels il est.

Votre règne n’est plus de ce monde, pourrais-je dire à l’intrépide défenseur de la question ; vous voyez que l’empire des erreurs, de ces erreurs si utiles à quelques particuliers, si funestes au public, vous voyez qu’il se détruit ; l’illusion s’évanouit, et fait