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scélérats, ne produisît le même effet que le code civil a produit chez les gens processifs ; qu’ils combineraient tellement les circonstances de leur crime, que la loi se trouvant en défaut, laisserait le crime impuni[1] ?


« La croyance due au témoin doit être mesurée sur l’intérêt qu’il a de dire ou de ne pas dire la vérité » ; et la loi qui a intérêt de la savoir, a dû exclure du témoignage ceux qui avaient intérêt de la lui cacher. Cet intérêt peut être naturel ou excité ; de sorte qu’il est très-sage de ne point admettre les dépositions de personnes notées d’infamie, parce qu’elles peuvent être plus aisément corrompues ; ni les parens de l’accusé, parce qu’ils ont un trop grand intérêt à ce qu’il soit absous.


C’est dans ce grand principe, que l’intérêt particulier est le moteur de la plupart des actions des hommes, que les accusations secrètes sont un abus manifeste dans une société dont la liberté est fondée sur la justice ; elles ne peuvent être admises que sous le gouvernement tyrannique d’un seul, et sur-tout de plusieurs, parce que dans ces différentes administrations, le mécontentement des sujets produit l’inquiétude des tyrans, et que la destruction des innocens les touche moins que celle des séditieux ne leur est utile.

  1. Ces craintes ont été détruites dans la Théorie des lois criminelles, de Brissot de Warville, et dans quelques autres ouvrages estimés. Il reste démontré que la publicité d’un code pénal, outre son utilité réelle, est de droit naturel.