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Pour qu’un châtiment soit juste, il faut qu’il soit proportionné au délit, et tel que le criminel lui-même soit forcé de sentir au fond de son cœur qu’il a mérité la peine qu’on lui impose.

Pour que la peine soit proportionnée au crime, il faut aussi que celui qui détruit soit détruit, parce qu’il pourrait détruire encore ; que celui qui trouble soit troublé, pour qu’il ne soit plus tenté de troubler à l’avenir. Voilà la loi qui condamne l’assassin à mort. Il eût prononcé cette même loi contre tout autre coupable, parce que sa propre sûreté la lui aurait dictée. Voilà son aveu et les preuves de la légitimité de son supplice.


Le premier des gouvernemens qui a dû s’établir, n’a pu être que le démocratique. Mais la volonté de tous, en opposition aux volontés particulières, pouvait d’autant moins contenir les hommes, que leur nombre s’augmentait. Ce fut alors que l’ambition et l’adresse vinrent au secours de l’anarchie, inévitable dans un peuple de souverains ; et le crime ou la persuasion donnèrent bientôt naissance à l’aristocratie, dans laquelle des individus représentant la volonté de tous, parvinrent à forcer les volontés particulières et à les contenir.

Ce n’est qu’à cette époque que l’on peut fixer la rédaction des lois criminelles ; les arbitres, que la force ou la persuasion venaient d’établir, avaient besoin que des conventions rédigées de manière qu’elles les forçassent à être justes, obligeassent en même temps les hommes à se soumettre. De sorte que c’est la