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DES DÉLITS ET DES PEINES.

jouir du reste avec plus de sûreté. La somme de toutes ces portions de liberté, sacrifiées ainsi au bien général, forma la souveraineté de la nation ; et celui qui fut chargé par les lois du dépôt des libertés et des soins de l’administration, fut proclamé le souverain du peuple.

Mais il ne suffisait pas d’avoir formé ce dépôt, il fallait le protéger contre les usurpations de chaque particulier ; car telle est la tendance de l’homme au despotisme, qu’il cherche sans cesse, non-seulement à retirer de la masse commune sa portion de liberté, mais encore à usurper celle des autres.

Il fallait des moyens sensibles et assez puissans pour comprimer cet esprit despotique, qui eût bientôt replongé la société dans son ancien chaos. Ces moyens furent les peines établies contre les infracteurs des lois.

J’ai dit que ces moyens durent être sensibles, parce que l’expérience a fait voir combien la multitude est loin d’adopter des principes stables de conduite. On remarque, dans toutes les parties du monde physique et moral, un principe universel de dissolution, dont l’action ne peut être arrêtée dans ses effets sur la société que par des moyens qui frappent