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reau, de savoir si l’on doit condamner le contumax, quand le crime n’est pas prouvé ; et la loi ne résout pas la difficulté.

Quand l’accusé a pris la fuite, vous commencez par saisir et annoter tous ses biens ; vous n’attendez pas seulement que la procédure soit achevée. Vous n’avez encore aucune preuve ; vous ne savez pas encore s’il est innocent ou coupable, et vous commencez par lui faire des frais immenses !

C’est une peine, dites-vous, dont vous punissez sa désobéissance au décret de prise de corps. Mais l’extrême rigueur de votre pratique criminelle ne le forcera-t-elle pas à cette désobéissance ?

Un homme est-il accusé d’un crime, vous l’enfermez d’abord dans un cachot affreux ; vous ne lui permettez communication avec personne : vous le chargez de fers, comme si vous l’aviez déjà jugé coupable. Les témoins qui déposent contre lui sont entendus secrètement. Il ne les voit qu’un moment à la confrontation : avant d’entendre leurs dépositions, il doit alléguer les moyens de reproches qu’il a contre eux : il faut les circonstancier : il faut qu’il nomme au même instant toutes les personnes qui peuvent appuyer ces