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On ne voit pas en effet qu’on puisse condamner les Codrus et les Curtius. Il n’y a point de souverain qui osât punir la famille d’un homme qui se serait dévoué pour lui ; que dis-je ? il n’en est point qui osât ne la pas récompenser. Saint-Thomas, avant Saint-Cyran, avait dit la même chose. Mais on n’a besoin ni de Thomas, ni de Bonaventure, ni de Hauranne, pour savoir qu’un homme qui meurt pour sa patrie est digne de nos éloges.

L’abbé de Saint-Cyran conclut qu’il est permis de faire pour soi-même ce qu’il est beau de faire pour un autre. On sait assez tout ce qui est allégué dans Plutarque, dans Sénèque, dans Montaigne et dans cent autres philosophes, en faveur du suicide. C’est un lieu commun épuisé. Je ne prétends point ici faire l’apologie d’une action que les lois condamnent ; mais ni l’ancien Testament, ni le nouveau, n’ont jamais défendu à l’homme de sortir de la vie quand il ne peut plus la supporter. Aucune loi romaine n’a condamné le meurtre de soi-même. Au contraire, voici

    les empereurs Néron et Tibère, ils étaient obligés de se tuer, pour le bien de leur famille et de leurs enfans, etc. » id. pages 18, 19, 29, 30. B.