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Quelque temps après, il retomba dans ses accès ; il dogmatisa. Sa mauvaise destinée voulut qu’il fit connaissance avec Saint-Sorlin Des Marêts, qui fut pendant plusieurs mois son ami, mais qui bientôt, par jalousie de métier, devint son plus cruel persécuteur.

Ce Des Marêts n’était pas moins visionnaire que Morin : ses premières inepties furent à la vérité innocentes ; c’étaient les tragi-comédies d’Érigone et de Mirame, imprimées avec une traduction des psaumes ; c’étaient le roman d’Ariane et le poëme de Clovis, à côté de l’office de la Vierge mis en vers ; c’étaient des poésies dithyrambiques, enrichies d’invectives contre Homère et Virgile. De cette espèce de folie, il passa à une autre plus sérieuse ; on le vit s’acharner contre Port-Royal ; et après avoir avoué qu’il avait engagé des femmes dans l’athéisme, il s’érigea en prophète. Il prétendit que Dieu lui avait donné de sa main la clé du trésor de l’Apocalypse ; qu’avec cette clé il ferait une réforme de tout le genre humain, et qu’il allait commander une armée de cent quarante mille hommes contre les jansénistes.

Rien n’eût été plus raisonnable et plus juste que de le mettre dans la même loge que