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partie du tout, et l’amour du bien public s’affaiblit dans la même proportion, si les lois négligent de le fortifier. Les sociétés politiques ont, comme le corps humain, un accroissement limité ; elles ne sauraient s’étendre au-delà de certaines bornes, sans que leur économie en soit troublée.

Il semble que la grandeur d’un état doive être en raison inverse du degré de sentiment et d’activité des individus qui le composent. Si cette activité croissait en même temps que la population, les bonnes lois trouveraient un obstacle à prévenir les délits, dans le bien même qu’elles auraient pu faire ; « parce que des hommes trop sensibles, trop éclairés et trop nombreux, seraient aussi trop difficiles à gouverner et à contenir[1]. »

Une république trop vaste ne peut échapper au despotisme, qu’en se subdivisant en un certain nombre de petits états confédérés. Mais pour former cette union, il faudrait un dictateur puissant, qui eût le courage de Sylla, avec autant de génie pour fonder, que Sylla en eut pour détruire.

  1. Ce membre de phrase a été ajouté par l’abbé Morellet. Il éclaircit la pensée de Beccaria, peut-être un peu trop profonde. Mais est-il juste ?…