leur selon les temps et les circonstances. Mais ce ne sont point les réformes opérées dans l’état ou dans les affaires publiques qui causeront cette révolution des idées ; elle sera la suite des erreurs et des intérêts passagers des différens législateurs.
Souvent on verra les passions d’un siècle servir de base à la morale des siècles suivans, et former toute la politique de ceux qui président aux lois. Mais les passions fortes, filles du fanatisme et de l’enthousiasme obligent peu à peu, à force d’excès, le législateur à la prudence, et peuvent devenir un instrument utile entre les mains de l’adresse ou du pouvoir, lorsque le temps les a affaiblies.
C’est par l’affaiblissement des passions fortes, que sont nées parmi les hommes les notions obscures d’honneur et de vertu ; et cette obscurité subsistera toujours, parce que les idées changent avec le temps, qui laisse survivre les noms aux choses, et qu’elles varient selon les lieux et les climats ; car la morale est soumise, comme les empires, à des bornes géographiques.