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CHAPITRE XXIV.

passions et de l’opposition des intérêts particuliers, a fait naître l’idée de l’utilité commune, base de la justice humaine. Au contraire, les rapports qui existent entre l’homme et Dieu, sont des rapports de dépendance, qui nous soumettent à un être parfait et créateur de toutes choses, à un souverain maître qui s’est réservé à lui seul le droit d’être à la fois législateur et juge, parce que lui seul peut être en même temps l’un et l’autre.

S’il a établi des peines éternelles pour celui qui enfreindra ses lois, quel sera l’insecte assez téméraire pour oser venir au secours de la justice divine, pour entreprendre de venger l’être qui se suffit à lui-même, que les crimes ne peuvent attrister, que les châtimens ne peuvent réjouir, et qui, seul dans la nature, agit d’une manière constante.

La grandeur du péché ou de l’offense envers Dieu, dépend de la malice du cœur ; et pour que les hommes pussent sonder cet abîme, il leur faudrait le secours de la révélation. Comment pourraient-ils donc déterminer les peines des différens crimes, sur des principes dont la base leur est inconnue ? Ce serait risquer de punir, quand Dieu par-