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CHAPITRE XVI.

revient à dire qu’il doit sacrifier sa vie à son propre bonheur ; savoir mourir plutôt que de savoir languir dans l’avilissement ou dans l’infortune ; aimer tellement la vie heureuse et noble, qu’il sache la quitter quand elle ne l’est pas.

Je ne rangerai donc pas les observations de Saint-Fargeau entre les motifs qui doivent déterminer à rejeter la peine de mort. Mais, au reste, elles sont exubérantes. Il y en a assez dans ce que j’ai dit, et sur-tout dans ce qu’on a dit avant moi, pour en déterminer l’abolition. Je pourrais même conclure de ce que j’ai dit, que toute peine afflictive est d’autant moins nécessaire, que les moyens de découvrir toute espèce de crime ou de les prévenir, sont plus perfectionnés. Rousseau et Diderot s’accordent avec Beccaria, à penser que la fréquence des supplices et leurs rigueurs, sont toujours des signes de faiblesse ou de négligence dans le gouvernement, de sorte que, malgré le droit qu’a chaque individu de souscrire à la peine de mort, une société bien organisée ne doit pas l’établir.

Je ne connais qu’un cas pour lequel la peine de mort soit nécessaire, c’est celui que Beccaria a excepté lui-même de la clémence des lois ; c’est le cas où un conspirateur ou un chef de faction accusé, aurait des relations et une puissance capables de troubler la tranquillité, et de produire une révolution dans la forme du gouvernement établi.