Page:Beccaria - Des délits et des peines, traduction CY, Brière, 1822.djvu/16

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de l’humanité, et personne ne s’est élevé contre moi… »

Toutefois les critiques abominables et les persécutions fanatiques, qui tourmentèrent les jours de ce paisible ami de la vérité, nous ont privé sans doute d’un autre chef-d’œuvre ; car Beccaria avait annoncé un grand ouvrage sur la législation ; il en avait disposé le plan ; il s’en occupait ; il n’osa le finir ni le publier.

Mais s’il avait lieu de craindre que les fureurs du fanatisme se réveillassent, elles s’appaisèrent pourtant, lorsque le nom de Beccaria fut devenu européen, et lorsqu’on pensa qu’il fallait l’occuper, pour l’empêcher d’élever de nouveau la voix en faveur des malheureux. C’est peut-être dans ce but qu’on créa pour lui, à Milan, en 1768, une chaire d’économie publique, où il professa avec distinction.

Il ne publia plus que quelques opuscules sur l’administration et sur l’économie ; il sentit avec l’âge, que les hommes sont des ingrats dont il est périlleux de rêver le bonheur ; il vit partout les philosophes persécutés ; il se rappela combien de brigues on avait soulevées contre lui ; et content de faire le bien dans le secret, il ne s’occupa plus que d’achever en paix, à l’ombre de ses lauriers, une vie qui n’était pas perdue pour l’humanité.

Nous ne devons pas oublier de dire qu’il eut la gloire de proposer à son pays, pour les poids, les mesures et les monnaies, en 1781, le système dé-