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DES DÉLITS ET DES PEINES.

mon adresse et de mon courage. À la tête de quelques hommes déterminés comme moi, je corrigerai les méprises de la fortune, et je verrai mes tyrans trembler et pâlir à l’aspect de celui que leur faste insolent mettait au-dessous de leurs chevaux et de leurs chiens. Il viendra peut-être un temps de douleur et de repentir, mais ce temps sera court ; et pour un jour de peine, j’aurai joui de plusieurs années de liberté et de plaisirs. »

Si la religion se présente alors à l’esprit de ce malheureux, elle ne l’épouvantera point ; elle diminue même à ses yeux l’horreur du dernier supplice, en lui offrant l’espérance d’un repentir facile, et du bonheur éternel qui en est le fruit. Mais celui qui a devant les yeux un grand nombre d’années ou même sa vie entière à passer dans l’esclavage et la douleur, exposé au mépris de ses concitoyens dont il était l’égal, esclave de ces lois dont il était protégé, fait une comparaison utile de tous ces maux, du succès incertain de ses crimes, et du peu de temps qu’il aura à en jouir. L’exemple toujours présent des malheureux qu’il voit victimes de leur imprudence, le frappe bien plus que les supplices,